La Préhistoire, en tant que période chronologique, est souvent définie comme le temps précédant l’apparition de l’écriture. Cette définition est formulée dès le début du XXe siècle par Gabriel de Mortillet. Il est considéré comme l’un des pères fondateurs de la Préhistoire et délimite celle-ci comme étant « l’histoire de l’homme avant les documents écrits, les documents figurés, voire même les traditions et les légendes » [6]. Néanmoins, la date de rupture entre la Préhistoire et l’Histoire est sujette à discussion.
Le terme “Préhistoire” signifie “avant l’Histoire”. Cependant, il semble arbitraire de décider que ce qui se passe avant l’apparition de l’écriture n’appartienne pas à l’Histoire. Pour rappel, suite à la découverte des premières tablettes sumériennes, il est admis que l’écriture est apparue en Mésopotamie il y a environ -3700 ans av. J-C. Néanmoins, à cette époque, l’écriture est loin d’être répandue. Il faut plusieurs siècles, voire plusieurs millénaires, pour qu’elle se propage à travers le monde. Ainsi, en Occident, l’écriture est longtemps réservée à une élite [4].
Pourquoi cette définition est problématique ?
Cette définition soulève également une autre problématique. En effet, sur 7 100 langues répertoriées, seules 200 sont écrites. Donc, actuellement, 97% des langues sont uniquement parlées. De ce fait, pouvons-nous considérer les peuples sans écriture comme figés au stade de la Préhistoire ? Serait-il juste d’affirmer qu’ils n’ont pas d’Histoire ? Ainsi, pour répondre à cette problématique, certains préhistoriens proposent d’utiliser à la place un critère économique.
Jean Guilaine [5], par exemple, préconise d’utiliser le début du Néolithique, période marquée notamment par le passage de populations de chasseurs-cueilleurs à des populations sédentaires pratiquant l’élevage et l’agriculture, comme marqueur de la fin de la Préhistoire. Cependant, cette transition s’étant effectuée sur une longue période et différemment selon les régions, il n’existe pas de rupture nette entre ces deux économies de subsistance. Dès lors, où mettre la limite entre une société fondée sur une économie de prédation et une société fondée sur une économie de production ? Autre problématique, des populations contemporaines sont toujours nomades.
Il est donc impossible de définir un critère correspondant à la fin de la Préhistoire qui fonctionnerait pour l’ensemble du globe.
Quand débute la Préhistoire ?
Est-ce différent pour la date de début de la Préhistoire ? Si la Préhistoire exclut tout ce qui passe avant l’histoire humaine, quand débute cette dernière ? Globalement, trois dates sont avancées.
La première date situe le début de la Préhistoire entre 2,8 et 2,5 millions d’années (abrégé par la suite Ma) avec l’apparition du genre Homo en Afrique. La seconde est placée à 3,3 Ma avec la fabrication des premiers outils connus à ce jour. Ils ont été découverts à Lomekwi en Afrique et sont l’œuvre des premiers Hominines dont font partie les genres Australopithecus, Kenyanthropus et Paranthropus. La dernière date, retenue par la majorité des préhistoriens, est située entre 7 et 5 Ma. C’est donc cette période que nous retiendrons comme début de la Préhistoire. Elle correspond au dernier ancêtre commun entre les chimpanzés et les êtres humains et à l’apparition de la lignée humaine.
Les dinosaures ayant disparus il y a environ 65 Ma ne font donc pas partie de la Préhistoire.
La discipline scientifique
Quant à la préhistoire, c’est la discipline scientifique qui étudie la Préhistoire.
Le préhistorien, contrairement à l’historien, n’a aucun écrit auquel se référer. Il ne peut s’appuyer que sur les éléments matériels collectés lors de fouilles et de prospections. En l’absence d’écrits et de témoignages, l’interprétation des matériels laisse place à un grand nombre d’hypothèses et d’interprétations possibles. Les constructions scientifiques sont donc le fruit d’années de recherches et d’études complexes qui nécessitent l’apport de nombreuses disciplines comme la paléoanthropologie, l’archéozoologie, la palynologie ou la carpologie sans lesquelles la préhistoire ne pourrait pas exister.
L’étude de la Préhistoire impose, comme pour toute discipline scientifique, d’être capable de remettre en question des théories communément acceptées mais aussi, et surtout, d’admettre que peut-être certaines questions ne trouveront jamais de réponses définitives.
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L’équipe de Prehistory Travel.
Bibliographie de l’article :
- [1] Balzeau Antoine, De Beaune Sophie A., La Préhistoire, collection Chroniques de l’Homme, éditions CNRS, 2009.
- [2] Bar-Yosef, Ofer. « Le cadre archéologique de la révolution du paléolithique supérieur », Diogène, vol. 214, no. 2, 2006, pp. 3-23.
- [3] De Beaune Sophie A., Qu’est-ce que la Préhistoire ?, éditions Gallimard, collection Folio Histoire, 2016.
- [4] Groenen Marc, Introduction à la Préhistoire, éditions ELLIPSES, 2009.
- [5] Guilaine Jean, Archéologie, science humaine. Entretiens avec Anne Lehoërff, Paris, coéditions Actes Sud-Errance, 2011.
- [6] Mortillet G., Mortillet A. de, La Préhistoire. Origine et antiquité de l’homme. Paris, Librairie Schleicher Frère, 1900
- [7] Emission RadioFrance du 1er mars 2016, “Qu’est-ce que la Préhistoire?”, https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/la-tete-au-carre/qu-est-ce-que-la-prehistoire-9852695
